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La galaxie la plus féconde en étoiles connue dans l'Univers tout jeune

Grâce à l'observatoire spatial Herschel de l'Agence Spatiale Européenne1, une équipe internationale d'astronomes, dont des chercheurs du laboratoire AIM, du LAM, de l'IAP et de l'IRAM, vient de découvrir une galaxie en train de subir une spectaculaire flambée de formation d'étoiles. Fait surprenant, cette galaxie si prolifique est observée alors que l'Univers était âgé de moins d'un milliard d'années, ce qui en fait un sujet d’étude très intéressant pour les astronomes. Cette étude est publiée dans un article de la revue Nature du 18 avril 2013.

Le taux de formation stellaire dans cette galaxie (baptisée HFLS3) est incroyablement grand. Il y naît l'équivalent de 3000 soleils par an, soit 2000 fois plus que dans notre galaxie, la Voie Lactée. HFLS3 se place donc parmi les galaxies les plus actives de l'Univers alors que celle-ci n'est âgée que de ... 900 millions d'années2. Paradoxalement, cette monstrueuse galaxie, qui a déjà atteint la masse de la Voie Lactée, aurait pu passer inaperçue dans les images du projet HerMES3 car elle n'apparaît que comme une tache rouge et faible. Rouge ou plutôt infrarouge car ses jeunes étoiles sont enveloppées dans une gigantesque nébuleuse de poussières interstellaires qui ne laisse pas passer la lumière visible ; faible à cause de l'énorme distance qui la sépare d’Herschel.

Les estimations de la masse de gaz transformée en étoiles de HFLS3 ont été réalisées grâce au logiciel CIGALE4 spécialement développé pour traiter les données observées par Herschel. Une galaxie isolée transformant en étoiles l'équivalent de 3000 fois la masse du Soleil en un an n'est pas censée être observée aussi tôt dans l'évolution de l'Univers. En fait, cette galaxie représente un phénomène si extrême que l'on pourrait la qualifier de « flambée stellaire maximale » : toute la galaxie produit frénétiquement de nouvelles étoiles à un rythme tel que leur propre radiation risque d'éparpiller la matière de la galaxie elle même.

Selon les chercheurs, les modèles prédisent que quelques galaxies massives se forment très tôt dans les régions les plus denses de l'Univers qui rassemblent très vite beaucoup de gaz et qui deviendront plus tard les amas de galaxies. En revanche, la vitesse à laquelle cette galaxie forme des étoiles est étonnante. Le seul phénomène que l'on connaisse qui puisse  déclencher une telle flambée est la fusion de deux galaxies déjà très massives pour cette époque. C'est un phénomène très rare, d'autant plus que les flambées de formation d'étoiles déclenchées par les fusions ne durent que quelques dizaines de millions d'années.

imgLa galaxie "HFLS3" a été initialement détectée comme un petit point rouge dans les images sub-millimétriques de l'observatoire spatial Herschel de l'ESA (image principale et colonne à droite). Des observations supplémentaires de l'optique au millimétrique (cadres insérés) avec d'autres télescopes montrent que deux galaxies apparaissent très proches l'une de l'autre. Elles sont toutefois extrêmement lointaines l'une de l'autre (ainsi que de la Terre). Toutefois, celle qui est vu en sub-millimétriques (en bleu dans le cadre inséré) est si distante de nous que nous l'observons telle qu'elle était lorsque l'Univers avait juste 900 millions d'années (13,7 milliards d'années aujourd'hui). Elle formaient, alors, 1000 fois plus d'étoiles par an que notre propre galaxie, la Voie Lactée en forme maintenant. Crédits : ESA/Herschel/HerMES/IRAM/GTC/observatoire W.M. Keck

La découverte d'une seule galaxie de ce type n'invalide pas les modèles en vigueur, mais, s'il se confirme que la fréquence de telles galaxies à cette époque est plus élevée que prévu, les astronomes devront les faire évoluer. En fait, avec cette découverte, ce qui est en jeu, c'est une meilleure compréhension des mystères du jeune Univers et de la formation de ses premières galaxies.

Note(s): 
  1. Pour la France, le CNES a financé avec le soutien du CNRS et du CEA, toutes les participations des laboratoires français du CNRS et du CEA impliqués dans l’élaboration des trois instruments embarqués (PACS, SPIRE, HIFI).
  2. A l’échelle d’une vie humaine, si l’on considère que l’âge actuel de l’Univers correspond à une personne âgée de 100 ans, cet événement se serait déroulé alors que cette personne n’était âgée que de 6 ans.
  3. HerMES (Herschel Multi-tiered Extragalactic Survey) est le plus gros programme parmi les programmes-clefs de la mission Herschel avec 900 heures d’observation qui lui sont allouées. Il a été conduit par le groupe de spécialistes de l’astronomie à grand redshift (étude de l’univers lointain) de l’instrument SPIRE. HerMES a réalisé une cartographie de très grandes régions du ciel en utilisant les caméras sensibles au rayonnement infrarouge. Il aura fallu plus de 10 milliards d’années à la lumière de la plupart des galaxies observées dans le cadre de ce programme pour nous atteindre, ce qui veut dire que nous les voyons telles qu’elles étaient 3 ou 4 milliards d’années après le Big Bang. Les instruments infrarouges permettent d’observer des régions qui sont cachées aux télescopes optiques (observant dans la lumière visible par l’œil humain) par des zones contenant des grains de poussière. SPIRE observe ces galaxies au moment où elles forment la majorité de leurs étoiles. Site web du projet HerMES : http://hermes.sussex.ac.uk/
  4. CIGALE est un logiciel qui est utilisé pour modéliser l'émission des galaxies. Il permet ainsi d'estimer des paramètres physiques tels que la masse en étoiles, le taux de formation stellaire, etc. http://cigale.oamp.fr
Pour en savoir plus: 

La singularité de cette source découverte par Herschel a justifié un programme de suivi au sol d'ampleur exceptionnelle par une dizaine de télescopes. Les efforts les plus importants ont été fournis par les réseaux d'antennes (interféromètres) millimétriques de CARMA (Californie) et du Plateau de Bure (IRAM, Hautes-Alpes). L'ensemble des résultats obtenus procure une précision exceptionnelle sur le décalage vers le rouge, z=6.3369, et surtout fournit des renseignements détaillés sur les conditions physiques et la grande extension spatiale de cette flambée stellaire maximale dont on ne trouve plus l'équivalent dans l'Univers actuel.

L'annonce sur le site de l'IRAM (en)

Source(s): 

A Dust-Obscured Massive Hyper-Starburst Galaxy at Redshift 6.34, Dominik A. Riechers et al., Nature, 18 avril 2013

Contact(s):
  • Denis Burgarella, Laboratoire d'Astrophysique de Marseille (LAM-Institut Pythéas/CNRS/Aix Marseille Université))
    denis.burgarella@oamp.fr, 04 91 05 69 71
  • Alain Omont, Institut d'Astrophysique de Paris (IAP-CNRS/UPMC)
    omont@iap.fr, 01 44 32 80 71

Les coordonnées ci-dessus peuvent avoir été mises à jour depuis la publication de cet article.

http://www.insu.cnrs.fr/node/4336

 
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